Extrait : Faire ses classes en Allemagne (1960)

Printemps 1960. De nombreux jeunes hommes partent faire leurs "classes". Beaucoup d'entre eux savent qu'ils seront bientôt appelés, pour rejoindre l'Algérie, théâtre d'événements meurtriers depuis plusieurs années. En attendant, c'est en Allemagne qu'ils apprennent les rudiments du métier de soldat.

Voici donc un petit extrait d'une biographie (avec, comme toujours, l'accord de mon narrateur). L'occasion de se familiariser avec le matériel militaire de l'époque, notamment les fameux Dodge américains.

"J’ai été affecté à Fribourg-en-Brisgau, un peu plus au sud. Mais la compagnie a été dissoute quelques semaines après et je suis revenu à Bühl où je suis resté dix mois, à partir de la fin du mois d’avril 1960.

J’étais donc devenu chauffeur de camion (dans la continuité de ma formation effectuée en Lorraine) et j’ai parcouru un peu la région de Bade-Wurtemberg en pilotant des Dodge, ces poids lourds américains équipés de remorques qui devaient supporter environ une tonne de charge utile. Outre l’absence de direction assistée, tout à fait excusable pour l’époque, il faut aussi signaler que ces véhicules n’avaient presque pas de freins. Il fallait pomper trois ou quatre fois pour que le camion accepte de ralentir un peu. Je dis bien « un peu ». Rouler en convoi avec de tels véhicules était donc très difficile. Nous avons effectué le déménagement d’une compagnie du service de Santé qui quittait Trèves, au nord de Sarrebruck, et qui revenait à Bühl. En effet, il y avait à Trèves une grande caserne qui regroupait toutes les armes, sur le belvédère. C’est là que les freins de mon Dodge ont prouvé leur faiblesse : je n’ai pas pu éviter la collision avec la remorque qui me précédait ; mais je n’ai pas été inquiété pour cet incident lié à la piètre qualité du matériel."